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Bruno GILLES |
ASSEMBLEE NATIONALE BRUNO GILLES DEPUTE DES BOUCHES-DU-RHONE MAIRE DU 3EME SECTEUR
Monsieur Jean Sirapian ADL France 29, rue Etienne Dolet 94140 Alfortville
Paris, le 5 décembre 2003
Monsieur le Président,
Vous avez souhaité attirer mon attention sur les propos tenus par un de mes collègues lors de la 2ème séance du 26 novembre dernier, et je vous en remercie.
Comme vous, j'estime qu'au regard de l'histoire comme du droit, la France se doit d'adopter une position claire concernant le génocide arménien de 1915. Elle doit manifester son attachement profond au respect des droits de l'Homme et des valeurs universelles qu'elle a toujours défendues.
La France doit lutter contre les tentations négationnistes trop fréquentes de nos jours et faire œuvre de pédagogie auprès des générations futures comme l'a souhaité M. Yves Ternon lors de son audition en 2001. Cet éminent expert a rappelé solennellement que "le massacre des Arméniens en 1915 est un génocide parce que les Arméniens ont été assassinés en masse ; les personnes assassinées l'ont été parce qu'elles étaient arméniennes ; tous les témoins de l'époque, diplomates, militaires, civils, ont attesté l'intention criminelle du gouvernement de Constantinople ; tous les documents ultérieurs ont confirmé cette intention. Ces faits ne peuvent pour les historiens, faire l'objet de controverse ".
Le génocide arménien répond en effet en tous Points à la définition que la Convention de Londres de 1948 donne du génocide. Tout y est : la planification, l'organisation des massacres, les arrestations arbitraires, la déportation, les camps de concentration, les viols et les tueries sur les sites, bref ce que l'on appellerait aujourd'hui le nettoyage ethnique. La reconnaissance du génocide participe au devoir de mémoire à l'égard de tous ceux qui ont choisi la France comme terre d'asile. A cet égard, je suis fier d'être un élu de Marseille qui a été la principale terre d'accueil de cette communauté. Elle est plus forte, grâce aux 80 000 Arméniens, qui ont enrichi son histoire. Fidèles à leurs racines, les descendants se sont parfaitement intégrés à notre pays, pour lequel ils n'ont pas hésité à verser leur sang.
Marseille a toujours été sensible aux souvenirs de cette communauté. En 1973, un mémorial commémoratif du génocide a ainsi été inauguré dans l'église arménienne de Marseille par le Professeur Joseph Comiti, alors ministre de Georges Pompidou.
De plus, pour la première fois en France, des élus d'une mairie de secteur de Marseille ont observé une minute de silence le 24 avril 1996 et ont publié une motion portant reconnaissance du génocide arménien. Cette démarche n'est reste pas isolée. L'année suivante, toutes les mairies de Marseille ont respecté une minute de silence. En 1997, le conseil municipal a été le premier à reconnaître publiquement le génocide et, en 2000, une avenue marseillaise a reçu un nom qui entretient le souvenir.
Le 9 novembre 2000, au lendemain de la reconnaissance par le Sénat du génocide arménien, des élus été invités à rencontrer la communauté arménienne de Marseille. Tous ont insisté sur ce moment d'émotion qui leur a permis de comprendre ce que représente le génocide dans la mémoire collective du peuple arménien. La tragédie, refoulée au plus profond, ravive les souvenirs les plus douloureux.
Dès lors, il ne s'agit pas de " qualifier l'histoire ", comme certains ont voulu le faire croire, mais de faire œuvre de justice, de vérité et d'honneur. En reconnaissant comme tel le premier génocide du XXe siècle, la France se montre digne de sa vocation de patrie des Droits de l'homme.
Espérant que ces quelques éléments seront de nature à vous rassurer, je reste à votre écoute et vous prie de recevoir, Monsieur le Président, l'assurance de mes sentiments les meilleurs.
Bien cordialement,
Bruno GILLES
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